Photojournaliste : une profession sacrifiée. C’est l’intitulé d’un rapport de la Scam, titre éminemment provocateur mais permettant surtout de placer les bases pour un débat de près de heures, ce mercredi 10 mars aux Assises.

Les médias évoluent, le photojournalisme avec. Des dizaines d’années que le monde des médias traverse une série de crises. Or, l’une des caractéristique du photojournalisme, selon Béatrice de Mondenard, journaliste et auteur du rapport de la Scam, est que « les budgets des services photo des différents médias sont immédiatement impactés », ce qui entraîne une irrémédiable réduction du nombre de photojournalistes. Paradoxalement, la photo prend une place de plus en plus importante dans les pages des journaux comme sur le web.

Pendant deux heures, ce sont les photographes qui se sont retrouvés face aux objectifs (crédit photo : Delphine Toujas)
Pendant deux heures, ce sont les photographes qui se sont retrouvés face aux objectifs (crédit photo : Delphine Toujas)

Sur ce point, Jean-François Leroy, directeur et fondateur de Visa pour l’image se montre très critique et déplore « l’utilisation de photos prétextes ou d’illustration, vides de tout sens » dont raffolent les grandes entreprises de presse pour diminuer les coûts. Dans la réalité des rédactions, les photographes sont peu à peu remplacés par les journalistes-rédacteurs qui doivent prendre les photos en plus de l’écriture de leur article. A ses yeux, ce n’est pas le photojournalisme qui est en crise mais bien « l’ensemble de la profession, qui refuse de mettre de l’argent dans des reportages mais dépensent sans compter pour faire du people comme autour des bébés royaux ».

Le web, un outil à double tranchant

Le directeur du service photo de l’Agence France Presse, Francis Kohn, met en lumière l’évolution des pratiques du photojournalisme, notamment « un glissement naturel vers la vidéo, qui est complémentaire ». Un optimisme que partage Pierre Morel, un jeune photojournaliste indépendant : « il y a plein de manières différentes de tirer davantage de revenus, il suffit de penser à 360° ». Béatrice de Mondenard semble partager ce constat, l’optimisme en moins : « Les photojournalistes sont aujourd’hui contraints de trouver d’autres sources de revenus que les entreprises de presse. »

La salle était pleine pour ce débat (crédit photo : Delphine Toujas)
La salle était pleine pour ce débat (crédit photo : Delphine Toujas)

Les réseaux sociaux, et notamment Instagram, constituent un autre espace d’avenir pour les photojournalistes. Pour Pierre Morel, il s’agit « d’une bonne manière pour se faire connaître ». Un enthousiasme immédiatement tempéré par Jean-François Leroy. Pour lui, en plus de veiller constamment à l’image renvoyée, il faut également se méfier à ne pas se fermer des portes : « certains médias réclament une exclusivité absolue et rejettent toute production déjà publiée sur internet. » Même s’il arrive que le passage par un réseau social permette d’obtenir un rendez-vous dans une rédaction. D’une manière ou d’une autre, les réseaux sociaux peuvent être des opportunités de faire décoller des carrières.

Delphine Toujas